Le cliché de l’écrivain solitaire
L’écrivain est un être solitaire, heureux de n’avoir à se livrer qu’à sa feuille blanche et indisposé à l’idée d’être plongé au cœur du monde réel qui l’entoure... Que vous soyez auteur ou lecteur, vous avez certainement déjà été confronté à cette vision que nous suggère l’inconscient collectif. Eh bien je souhaiterais aujourd’hui partager avec vous une autre image de l’auteur. Une image plus humaine. Moins intellectuelle. Plus réelle surtout. Celle à laquelle je me frotte en étant moi-même romancière mais aussi et surtout, celle que je lis entre les lignes et à demi-mot sur les lèvres des auteurs que j’accompagne dans leur communication.
Non l’écrivain n’est pas écorché vif qui se complait dans sa bulle.
L’écrivain est un être qui a un jour croisé l’écriture comme d’autres la musique ou le sport et y a trouvé un moyen d’exprimer ses sentiments, ses rêves, ses envies. Et comme tout artiste, son moteur est bel et bien la communication. Alors bien sûr pour l’auteur, cette dernière commence par un dialogue intérieur, un accouchement de sensations qu’il doit souvent d’abord se révéler à lui-même, avant de les ouvrir aux autres. Mais cela ne signifie pas pour autant que ses émotions restent au stade de cri intérieur couché sur un bout de papier. Si un homme prend la plume c’est aussi pour se connecter avec les autres et interpeller sur sa vision et son ressenti du monde.
Non. L’écrivain n’est pas un ours inaccessible.
L’envie d’écrire n’est pas ultimement celle de se parler à soi. Il y a bien sûr dans l’écriture une première démarche qui relève de la réflexion, de l’introspection. Mais attention, l’auteur qui réfléchit n’est pas pour autant un auteur qui s’isole. Déjà, parce que la créativité est un moment qui peut se partager, lorsque l’on co-écrit ou lorsque l’on fait partie d’un atelier d’écriture. Ensuite parce qu’il existe chez tout auteur une envie très occultée par la peur et parfois la timidité : celle de savoir qui aura été touché par ses mots.
Si l’écrivain donne parfois l’impression de rejeter son environnement, c’est principalement parce qu’il a du mal à parler de son écriture, à la dissocier de ses ressentis et parce qu’il craint d’être mis à jour ou critiqué pour ses mots. Cette pudeur et cette timidité sont souvent confondues avec de la supériorité ou un besoin d’isolement mais ne vous y trompez pas. L’auteur veut rencontrer son public, l’émouvoir, partager.
D’ailleurs pour le vérifier je vous propose un petit exercice, la prochaine fois que vous croiserez un ami auteur, demandez-lui de quoi parlent ses écrits, d’où lui vient cette pulsion… et vous mesurez immédiatement à quel point son désir d’échanger est grand !