Au-delà des apparences
"Agir, c’est risquer d’aller au-delà des apparences."
J’ai écrit cette phrase en avant-propos de mon prochain roman parce qu’elle illustre assez bien ce qui a motivé son écriture : la force des préjugés et le rôle de l’immobilisme de chacun dans l’entretien de ces derniers.
Depuis les années 80 et la montée d’une culture de l’individualisme, s’est peu à peu renforcée l’idée que l’on est ce que l’on consomme, les apparences étant de plus en plus intimement liées aux aspirations et aux convictions de chacun. Un vêtement, une voiture, un appartement, un lieu de vacances, en disant plus long qu’une conversation... On pourrait d’ailleurs s’amuser à changer régulièrement de look, pour voir changer sur soi le regard des autres. Cela m’est arrivée une fois, involontairement.
J’étais alors en transit à Madrid, de retour de deux semaines de vacances. La peau brunie par le soleil, le cheveu emmêlé par une nuit blanche passée entre l’aéroport et le siège inconfortable de l’avion, j’étais vêtue d’un sarouel et d’un t-shirt noirs et d’une vieille paire de tennis, lorsque nous avons décidé de faire un tour dans la ville en attendant notre dernier vol. Étant la seule de la tribu Lapegue à parler espagnol, je décidai de marcher devant, à la recherche d’une personne pouvant m’indiquer le chemin vers le parc le plus proche ; il était environ 9 H00 du matin et la plupart des passants partaient travailler. La première femme que je voulus aborder, tout sourire dehors, accéléra le pas et fit un écart pour ne pas me croiser de trop près. Dans le doute, je me lançai vers un autre passant, mon plan de la ville à bout de bras. Croyant certainement que je voulais lui vendre quelque chose, le jeune homme a tendu la main pour me tenir à distance et, sans m’accorder un regard, a maugréé en espagnol qu’il n’était pas intéressé.
Je dois vous avouer que cette expérience, si elle a beaucoup fait rire mes fils, ennemis jurés du sarouel quelle que soit la saison, fut pour moi aussi choquante qu’édifiante. J’ai alors mesuré à quel point on pouvait être violemment rejeté, simplement à cause de son apparence.
Nous vivons une époque où la norme consiste à nous pousser à faire partie de « communautés » qui, au lieu de nous rassembler, nous séparent les uns des autres. IN ou OUT. POUR ou CONTRE. Ces soit -disant lieux de rassemblement (souvent virtuels d’ailleurs...), au lieu de nous permettre de nous découvrir et d’échanger, nous divisent et nous confortent dans des opinions fermées, nous amenant à faire des choix dont, souvent, la finalité ne nous appartient même pas.
Les apparences se nourrissent de l’immobilisme, du discours ambiant et d’une communication venue de l’extérieur. L’action, individuelle ou collective, nous pousse à aller au-delà de ces classifications superficielles, à se frotter nos ressentis, à la vérité de l’autre, à sa différence. Et c’est seulement à ce niveau-là que peut avoir lieu, non pas un consensus dicté par une communauté, mais un échange d’Homme à Homme, qui, j’en suis convaincue, fait évoluer la vision de chacun.
C’est de cela dont parle mon roman « À L’AUTRE BOUT DE LA LAISSE », de cette nécessité d’aller au-delà du confort des préjugés et des opinions prémâchées. De passer à l’action pour se frotter à notre propre réalité et construire notre propre vision des choses, en toute indépendance. Cette idée vous séduit, vous irrite ou vous questionne ? N’hésitez pas échanger ici
En attendant, je vous souhaite une bonne semaine à tous et n’hésitez pas à nourrir votre propre réalité !