Blog

26 Nov 2018

L’Art, au delà des frontières.

La Frontière. Une notion que notre société nourrit chaque jour un peu plus, à force de murs de barbelés, de silences ou d’incompréhensions.

C’est en assistant à une conférence sur les frontières de l’art que l’idée m’est venue de rédiger cet article et de me demander si, face à la notion de frontière, souvent perçue comme un fossé se creusant inexorablement entre les hommes, l’art ne devait pas être un moyen de fédérer, de réfléchir, de créer ensemble. 

La mondialisation, l’accès à internet, le mélange des cultures, nourrissent l’art d’une diversité qui n’a jamais été aussi grande.
Être artiste et se faire connaître n’a jamais été aussi accessible. Voyager virtuellement ou réellement pour faire partager sa vision ou  découvrir de nouveaux talents venus de l’autre bout du monde est devenu possible ! Les moyens de publication, d’édition se sont eux aussi démocratisés, grâce à l’autoédition. La société dans la quelle nous vivons a besoin de créer des choses nouvelles et a de nombreux outils pour le faire. C'est une société où chacun peut nourrir une idée, en faire de l’art et la faire voyager au delà des frontières, sans voir à passer pas l’intermédiaire de professionnels ou de corporations.

Et même si tout le monde n’a pas le même talent, ce qui importe au fond, c‘est que l’art continue à vivre et à circuler, non ?

Alors pourquoi l’art n’est-il pas encore intégré comme étant un bien commun de culture et de création ? Pourquoi tout le monde ne se sent-il pas en droit de produire ou d’apprécier l’art ?

Peut être est-ce parce que notre éducation nationale, en réduisant les arts à deux heures de pipeau et d’aquarelle,  a fait de l’art un objet culturel normé et réservé à une élite ?  Peut-être est-ce parce que les représentants (trop peu) médiatisés du milieu artistique semblent venir d’une autre planète,  ou bien être particulièrement inaccessibles.

Accéder à l’art, c’est accéder à des idées nouvelles, c’est nourrir autrement sa pensée créative. C'est changer le monde individuellement et collectivement. Alors pourquoi ne pas utiliser ce moyen de locomotion extraordinaire pour aller au delà des frontières sociales, géographiques, politiques ? 

C’est cette volonté qui m’a animée lorsque j’ai fondé Booknseries : faire en sorte que la littérature reste diversifiée et accessible à tous. Je sais que nombreux sont ceux qui partagent cette idée. Je les invite à commenter cet article... ou à venir en discuter avec moi le  11 Décembre à  Bordeaux, à la Causerie des Chartrons lors de notre soirée Booknseries, une soirée  littéraire et décontractée entre auteurs et lecteurs de tous horizons  (tous les détails ici )  

 

 

 

19 Nov 2018

Je ne suis pas (que) ce que j'écris

J’ai longtemps été très influencée par le regard des autres, certes dans mes actes, mais surtout dans mes pensées, sans cesse à me demander si je n’avais pas mal agi, été trop ceci ou pas assez cela…

C’est à presque quarante ans et en grande partie grâce à l’écriture, que j’ai commencé à me libérer du poids de cette culpabilité, à distinguer ce qui, dans le regard des autres, pouvait être destructeur de ce qui pouvait être nourrissant. À choisir de vivre tout simplement !

Je ne suis pas ce que je dis, ce que je fais ou ce que j’écris. Je suis, c’est tout.

Cela peut paraître idiot mais l’idée que l’on ne se résume pas à une action isolée est très libératoire et très nourrissante.  Ce que nous sommes est un tout. Intégrer que, lorsque notre livre est critiqué, c’est le livre qui l’est et non notre propre personne. Comprendre que lorsque l’on commet une erreur, elle ne nous avale pas entièrement, réduisant à zéro l’ensemble de nos actions positives. Savoir que notre part de lumière ne pourrait exister sans une petite part d’ombre et que nos échecs nous permettent de mesurer le chemin parcouru…

Être responsables de ce que nous faisons, ou de ce que nous écrivons, n’implique pas que nous soyons responsables de la façon dont les personnes extérieures le vivent ou le perçoivent.

Auteur(e), ami(e),  mère, père, fils,  fille, professionnel(le),  amant(e), connaissance, inconnu(e)… Chacun aborde votre personnalité et vos écrits dans un certain contexte, et avec une personnalité qui lui est propre.

Et si jugement des autres est important, car nous ne pouvons pas évaluer seul certaines compétences, ou nous mettre à la place du public pour décider du succès d’un de nos livres, il est forcément incomplet, forcément subjectif. Il ne peut donc, à lui seul, conditionner l’estime que nous nous portons à nous même.

Alors la prochaine fois que vous doutez de votre talent, de vous, de tout ! Pensez à moi et dites vous que vous êtres bien plus qu’un acte isolé. Vous être un mélange complexe et unique qui chaque jour évolue, se nourrit, se transforme et que vous êtes en droit ( si ce n’est en en devoir !) d’aimer !

Belle semaine les amis !  

 

 

12 Nov 2018

Plus de peur que de mal

Peur des critiques, peur que ça ne marche pas, peur de ne pas être assez bon(ne), peur de pas vendre, peur d’être piraté(e), peur de ne pas savoir communiquer … Lorsque je parle à des auteurs en herbe de leur projet d’édition, qu’elle soit indépendante ou via un éditeur, c’est d‘abord la peur qui s’exprime.

Je me rappelle une phrase que me disait mon boss durant mes premières années en entreprise : « ne faisons pas aïe avant d’avoir mal » . C’est vrai. Pourquoi faudrait-il toujours anticiper le pire ?

Peut-être parce qu’avoir peur nous arrange. Sûrement aussi parce que nous sommes formatés ainsi…

La peur, bien souvent, est un moyen de retarder l’échéance.
Elle est l’alibi que notre cerveau trouve pour justifier d'un certain immobilisme. La peur renforce l’idée, très française, selon laquelle il faut tout border avant de se lancer. Mais n’est ce pas en essayant que l’on apprend ? Passer à l'action ne signifie pas que l'on ne puisse pas continuer à progresser, bien au contraire ! 

La peur se nourrit toute seule.
Plus vous exprimez vos craintes, plus vous les attirez. En exprimant votre peur d’être critiqué, vous allez certainement récolter des anecdotes, des exemples  venant renforcer votre peur. Même chose si vous vous présentez comme un débutant ou un amateur : les lecteurs vous traiteront certainement comme tel.

La peur est personnelle mais elle se projette sur les autres.
Ceux qui pensent qu’ils ne pourraient jamais faire ce que vous faites projetteront sur vous, même involontairement, leurs propres peurs. C’est par exemple le cas lorsque vous décidez de quitter votre job et que vos collègues vous traitent de fou. Ce n’est pas pour vous qu’ils ont peur mais ils se mettent à votre place. Ouvrir ses pensées et son cœur au public est un risque qu’un grand nombre de personnes ne se sent pas prêt à prendre.   

La peur isole.
Si la peur est le moyen le plus simple de gouverner, c’est parce qu’il est celui qui, tout en rassemblant contre des ennemis communs, multiplie les raisons de se méfier de son voisin, affaiblissant ainsi l’individu grâce à l’isolement. Se méfier de tout le monde, anticiper systématiquement l’arnaque ne permettra pas à un écrivain d’apprendre et de bénéficier de l’aide qui lui est proposée.

On peut être prudent sans être méfiant. Avoir des craintes sans anticiper le pire. Avoir peur doit rester un moyen d’alerter, pas être un frein à la réalisation personnelle.

Le monde chaotique dans lequel nous vivons a l’avantage de nous donner accès à une multitude de moyens de nous réaliser : la possibilité de créer une micro entreprise, de voyager, de bénéficier de services sur mesure via internet, de créer et d’identifier des réseaux qui nous ressemblent … Alors ne vaut-il pas mieux saisir sa chance que de préserver une fausse tranquillité ? Et puis, au fond, il ne s’agit que de prendre plaisir à partager des histoires, ne l’oublions pas :)    

29 Oct 2018

Trouver son public c’est se trouver soi-même

Si je n’ai pas écrit d’article la semaine dernière, c’est que j’ai eu le plaisir de faire une formation blogging auprès d’étudiants de première année en école de commerce.
Le challenge de ce parcours de cinq jours était de leur faire écrire un article blog ciblé et de le leur faire contextualiser en imaginant la ligne éditoriale du site où il serait posté.

Devant confronter des étudiants plutôt jeunes à l’écriture de style et à des notions théoriques assez abstraites, j’avais décidé de les laisser totalement libres de leur choix d’article, de les faire réfléchir ensemble mais de les faire rédiger individuellement : je voulais que chacun soit confronté aux réflexions des autres mais aussi libre et responsable de son propre travail.
Je suis de celles qui pensent que l’on ne peut pas apprendre, construire ou, a fortiori, travailler, uniquement pour les autres. Il me semble qu’il est nécessaire de trouver un sens personnel à toute chose pour se l’approprier et y prendre plaisir…

Au terme des 5 jours, chacun me présente son travail, un travail souvent très qualitatif et qui est parfois allé bien au delà de ma demande, avec l’ouverture d’un vrai blog en ligne. Or lorsqu’au terme de leur soutenance, je demande aux élèves ce qui a marqué leur apprentissage de la semaine, toutes leur réponses ont un point commun : ils sont heureux d’avoir pu choisir de parler d’un sujet qui leur plaisait. Et même si, au départ, la plupart des élèves ne se sentait pas capable d’écrire un article, à la fin de la semaine, tous étaient très fiers d’avoir réussi, grâce à mon aide, à partager une passion ou un point de vue, avec, pour certains, la découverte d’un vrai goût pour l’écriture.

Apprendre mais en se sentant libre de créer et responsable de ce que l’on fait.

Lorsque j’étais manager en entreprise, cette posture m’a parfois causé des problèmes, si bien qu’à un moment, l’idée de devoir changer et de diriger les gens de façon plus autoritaire m’a effleurée. Pourtant je ne l’ai pas fait et j’ai fini par partir pour trouver un contexte où l’autonomie et la créativité de chacun serait davantage valorisée.

En faisant cette formation et alors que mes élèves me remerciaient pour mon écoute, j'ai songé que je m’étais longtemps fait croire que je n‘étais pas adaptée au monde où je vivais, alors que j’étais tout simplement au mauvais endroit.
Trouver son public, me suis-je dit en voyant leurs sourires, que ce soit en écriture comme dans tout autre domaine, c’est avant  tout se trouver soi-même.    

Bonne semaine les amis ! 

15 Oct 2018

La marcheuse aux lunettes noires.

Cela fait plus de dix ans que je la vois.
Elle sort tous les jours, quel que soit le temps. 
Été comme hiver,  la tête cachée sous d’improbables turbans et de larges lunettes noires…
Impossible de lui donner un âge. Difficile de lui imaginer une vie.

Sa peau, couleur craie, dépasse à peine sous les couches de vêtements qui la protègent, tantôt de la pluie, tantôt du soleil.
Lèvres pincées, dos cassé, poings serrés, elle avance, inlassablement.
On pourrait croire à un automate, tant sa démarche est caricaturale, tant son allure est étrange.  Elle ne court pas. Elle ne marche pas. Elle avance… 
Seule la douleur émanant d’elle la rend humaine.
Penchée en avant, ployant sous son propre poids, elle grimace, semble exténuée.  

Hier je l’ai vue, sur la piste cyclable qui longe les bois près de chez moi, marchant étrangement, comme à son habitude. 
Mais soudain, elle s’est arrêtée. Elle a relevé la tête et, d’un coup, s’est mise à trottiner ! Presque à courir !

C’est une autre personne, me suis-je dit !

Peut être sait-elle enfin où elle va ? Peut-être est-elle pressée de rentrer !
Peut–être a t-elle découvert qu’elle pouvait courir, si elle le voulait !
Peut-être, en relevant la tête, a t-elle compris qu’elle faisait partie du monde et a eu envie de foncer vers les autres !
Hier, la marcheuse aux lunettes noires a relevé la tête et elle s'est mise en mouvement.
Hier, la marcheuse aux lunettes noires est redevenue vivante.

Bonne semaine les amis... 

08 Oct 2018

Lettre à la jeunesse

À tous ceux à qui on dit qu’il va falloir se serrer la ceinture, serrer les fesses,
serrer la vis.
À tous ceux à qui on parle de la crise et jamais de leurs rêves.
À tous ceux que l’on regarde d’un air désolé en leur laissant les clés d’un monde qui ne fait pas très envie.
À tous ceux qui s’entendent dire qu’il va falloir changer de look pour bosser, d’attitude pour s’intégrer.

Ne croyez pas que vous n’avez plus d’autre choix que de ramasser les miettes d’un monde que vous n’avez pas créé.
Ne croyez pas ceux qui vous disent de faire attention, car ce sont de leurs propres peurs qu’ils parlent.
Ne croyez pas ceux qui vous disent qu’il n’y a pas de solution, les trouver à leur place reviendrait à prouver leur immobilisme.   
Ne croyez pas ceux qui, pour garder le pouvoir, disent tout savoir et oublient de créer.

Le chaos du monde dans lequel nous vivons est une formidable opportunité pour la jeunesse.
Là où les ainés ont échoué, là où ils pataugent, là où ils tremblent pour leurs acquis,
vous n’avez rien à perdre, tout à inventer. 
Et, eux, ont beaucoup à apprendre de vous.

Nous avons tant à apprendre des nouvelles générations.

J’ai eu le bonheur la semaine dernière, à deux reprises, d’échanger avec de jeunes étudiants, certains en école de marketing et communication et d’autres en école de métiers du livre. J’ai été stupéfaite par leur enthousiasme, leur curiosité, mais désolée aussi, de voir comme le discours de certains adultes pouvait être inhibant pour leur créativité.

Alors aujourd’hui j’ai envie de m'adresser à eux et de leur dire merci. Merci pour votre envie, pour vos idées, pour votre énergie.  Tout est possible quand on y croit. Ce n’est pas aux autres et au système que vous avez besoin de vous intégrer, mais au monde qui vous entoure, un monde que vous avez le pouvoir de changer !    

Bonne semaine à tous !     

01 Oct 2018

Mes carnets et moi ...

Combien d’entre vous ont toujours avec eux un bloc notes, un  cahier, dans lequel ils écrivent leurs pensées, leurs idées… ou leurs listes de courses ! 

Personnellement, et malgré les outils de saisie électronique, je continue à organiser ma vie autour de carnets achetés sur un coup de cœur et noircis de façon plus ou moins anarchique, selon leur fonction.

À ce jour, ils sont trois à me tourner autour et à se partager ma plume.

Le premier est un Moleskine Harry Potter, un vrai carnet d’auteur pour lequel j’ai craqué il y a un an : j’y note toutes les idées inspirantes et structurantes autour de mes romans. Il est à la fois la bible de mon écrit en cours et l’endroit où je note tous les changements qui le feront évoluer.

Le second support est mon agenda papier : chaque année, je rachète un modèle que j’aime toucher et avoir constamment dans mon sac. C’est lui qui, à la volée et entre deux rendez-vous griffonnés, reçoit les bons mots, les titres de chansons ou de livres, et toutes les autres pépites que la journée me livre à l’improviste.  

J’avoue avoir, depuis peu, et pour des raisons de praticité, commencé à compléter ces deux outils de notes par des enregistrements sur mon téléphone : devoir me lever de mon lit pour aller chercher un carnet et un stylo quand une idée surgissait après 23H, m’a souvent valu de la perdre !     

Vient enfin un cahier de vie : entre le journal de bord et le journal d’humeur,  j’y consigne quotidiennement mes objectifs consciemment atteignables, ainsi que ceux vers lesquels je charge mon inconscient de me diriger. Cela m’évite de passer du temps à penser aux problèmes auxquels je n’ai pas de solution immédiate et me permet de me concentrer sur ce que je peux faire. J’y note aussi mes envies et ce dont je veux m’éloigner.  Il est l’outil au travers duquel j’apprends à mieux me connaître et à avancer. 

Former des lettres, noircir des pages, prendre conscience. Les carnets sont pour moi des compagnons, des instantanés de vie qui m’ancrent dans le présent et me poussent vers le futur.  Et vous ? Quels sont les carnets qui accompagnent votre vie ? À quoi vous servent-ils ? 

24 Sep 2018

Relever le défi de la forme

Alors que je m’apprête à entrer dans l’écriture de mon prochain roman, alors que le premier chapitre tourne en boucle dans ma tête et que mes personnages m’attendent pour prendre vie, je suis encore retenue par la forme que je veux mettre autour de mon récit.

L’histoire est une chose, la façon dont on la raconte est, à mon sens, tout aussi importante. Et pas seulement parce que j’écris du suspense.  
Le rythme, le point de vue du narrateur, les scènes cachées … autant de défis à relever au delà de l’intrigue. Une construction qui, à l’aube d’un roman,  me préoccupe tout autant que ce je vais y raconter.

Construire un  Huis-clos pour « Le fauteuil de César », m’a permis de confronter mes personnages à chaque seconde. De renforcer un malaise et une suspicion liés à la promiscuité. 

Utiliser un ‘je’ intimiste dans « Comme un garçon », était le meilleur moyen d’embarquer le lecteur dans les interrogations de Naya, dans sa quête intérieure, totalement connectée à l’enquête menée par l’héroïne autour d’un secret de famille.

Dans « La Bascule », en alternant à chaque chapitre, passé et présent, ainsi que le point de vue du narrateur,  j’ai pu faire rentrer le lecteur dans la tête de mon commercial psychopathe, lui faire percevoir plus finement sa lente évolution, afin qu’il ne le juge pas seulement par ses actes.

Mes deux polars psy, « Une vie Meilleure » et « Mea Culpa », ont été construits de façon plus traditionnelles, articulés autour du rythme de l'action et des révélations. 

Quant à « Female », je ne sais pas si ce sera le cas un jour, mais je l’ai écrit dans l’idée de faire une suite. J’ai donc volontairement enrichi l’univers dystopique de détails dont je pourrai me resservir, et laissé autour de l’histoire des personnages des portes que je pourrai rouvrir un jour…

Aujourd’hui, et même si je ne peux pas en dire plus, je mets la musique au cœur d’un roman que je voudrais original dans la façon dont il embarquera le lecteur dans mon univers  …  Relever le défi de la forme que me lance mon  écriture, c’est tenter une nouvelle aventure, celle qui donnera à mon histoire sa vraie dimension !  

à très très vite amis lecteurs...

17 Sep 2018

L’ingrédient qu’on n’attend pas …

« Une chanson est faite de trois ingrédients : les paroles, la musique et un troisième ingrédient, que l’on n'attend pas … »

Ces mots sont tirés d’un portrait du fascinant Jacques Brel sur lequel je suis tombée ce week-end sur France 3 ( et que je vous recommande ) .

En écoutant ces paroles, j’ai eu le sentiment d’une évidence.  Écrire un roman, c’est aussi savoir accueillir cet ingrédient inattendu.

Ce besoin viscéral de dire, qui, bien au delà de l’exercice, fait de l’écriture un moment de plaisir intense où l’on s’oublie totalement.
Cet événement extérieur, cette rencontre imprévue qui, venant se greffer à notre histoire, l'imprègne d’un réalisme touchant.
Cette douleur ou ce bonheur, qui, saupoudrant la plume, vient la teinter d’une émotion unique.
Cette musique qui, traversant notre cerveau, décuple l’intensité des scènes…  

Si les idées et les mots sont intemporels, le troisième ingrédient de notre créativité, lui, est éphémère.
Aussi insaisissable qu’une étoile filante, aussi improbable qu’un rêve éveillé, il rend l'écriture plus précieuse, plus fragile, plus sincère… il la rend vivante, tout simplement !

    

10 Sep 2018

« Un auteur de polar, ça boit et ça fume, non ? »

Je suis chez le médecin chargé de mon expertise psychologique, celui qui, 18 mois après mon accident de voiture, doit faire un bilan post traumatique. Le doc’ est de bonne humeur. Je sens que mon côté auteur à la mine bronzée le change des porteurs de minerves qui doivent défiler dans son cabinet du matin au soir.   
Le médecin me sert un sourire entendu puis se reprend :
- Non. Mais vous n’avez pas l’air d’être ce genre d’auteur. Si ?  

Quel genre d’auteur suis-je ? Dans ma tête, j’essaye de répondre. Dans le désordre :

Je sors un roman par an. Ce qui fait déjà six à ce jour.

J’ai fumé. Beaucoup. Je fume encore, rarement, à l’occasion. J’aime boire un coup, parfois deux, c’est vrai.

J’écrivais la nuit. Maintenant j’écris surtout le matin.

Mes romans parlent des choses de la vie. Souvent de la mienne.

Je réfléchis sans cesse au sens de la vie. L’écriture m’aide à poser les questions qui me hantent. Celles qui me font avancer.

Je doute de presque tout mais jamais de mon besoin d’écrire. 

Lorsque j’écris, je suis obsédée par l’idée d’honnêteté, vis à vis de moi-même. Vis à vis des autres.

L’écriture me nourrit chaque jour mais ne me permet pas d’en vivre. Et ce n’est pas mon rêve. J’ai besoin de vivre d’autre chose pour pouvoir écrire librement et sans pression.   

Mon rêve serait de voir mes livres gagner un lecteur chaque jour. De les voir portés à l’écran aussi.

Je suis fascinée par les gens. Tous les gens. Je les regarde avec attention, partout, tout le temps. J’imagine sans cesse quels personnages de mes romans ils pourraient être. Peut-être est-ce pour cela que je mélange ensuite, les noms et les visages. Incapable de faire le tri dans cette galerie.

Je suis auteure de romans noirs. Pas parce que le noir c’est sexy mais parce qu’on ne peut pas toujours être rose.

J’ai toujours peur que mes lecteurs s’ennuient. Heureusement que le suspense existe.

J’ai longtemps cru que j’avais quelque chose à prouver avant de pouvoir être  lue. Je sais à présent que c’est en écrivant que je me libère de l’obligation d’avoir à prouver quelque chose. Je suis auteur mais je suis Laure avant tout, armée d’une plume…

La voix du psy me sort de mes pensées :

- J’aimerais bien vous lire. Quel est le nom de votre meilleur roman ? 

- Le dernier. Le fauteuil de César.

- Je ne vous ai pas demandé le dernier. J’ai demandé le meilleur !  insiste t-il comme si je passais un entretien d’embauche.

Il a du oublier que je suis une patiente…  

- Je sais, je réponds docilement. C’est que je suis comme le  bon vin. Je m’améliore en vieillissant…

- Le fauteuil de César... Un roman historique ?

- Non. Un huis clos à suspense. Un truc psy. Ça devrait vous plaire...

Il rit et griffonne le titre de mon roman sur la couverture de mon dossier, juste sous mon nom. Je le regarde faire. Cette fois je souris vraiment.
Oui monsieur. Je suis ce genre d’écrivain.

 

 

Credit Photo . Didier Bizos 

track